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Entretien: Mehdi Dehbi - Le fils de l'Autre
Par Michel Decoux-Derycke - Dans le film de Lorraine Lévy, "Le Fils de l'Autre", Yacine est joué par Mehdi Dehbi, jeune comédien belge né à Liège. Il a tourné son premier long-métrage, "Le Soleil assassiné", à l'âge de 16 ans. Ensuite, il a intégré le Conservatoire Royal de Bruxelles, puis le Conservatoire National d'Art Dramatique de Paris, enfin un conservatoire à Londres. Depuis lors, Mehdi Dehbi est apparu dans quatre films et un téléfilm.
Comment vous êtes-vous retrouvé dans "Le Fils de l'Autre" ?
Lorraine Lévy a vu "L'Infiltré" dans lequel je joue le rôle principal, celui d'un jeune Palestinien. Elle a voulu me rencontrer pour le rôle de Yacine. Nous nous sommes vus et c'est là que ça a vraiment commencé pour moi. J'avais lu le scénario avant mais il était important pour moi de savoir qui porte le projet, comment on raconte cette histoire, avec quel regard, quelle est l'idée sur le personnage. En rencontrant Lorraine, j'ai été complètement rassuré. J'étais en confiance, je sentais que je pouvais échanger avec elle, lui dire mon ressenti sur le scénario. Nous avons pu évoluer ensemble et créer le personnage ensemble.
Ce personnage vous a-t-il intéressé parce qu'il était Palestinien ?
Mon entrée vers la Palestine, cela a été un poème qui s'appelle "Pour la Palestine" que j'ai découvert à seize ans. Depuis ce poème, je me suis intéressé à cet endroit du monde. Voir des films, découvrir la littérature. La Palestine est aussi venue vers moi vu que l'on m'a proposé des rôles de Palestinien au théâtre et au cinéma, deux fois. Là, j'ai un projet avec des acteurs palestiniens que j'ai rencontré l'été dernier. Je suis resté deux mois en Palestine. Avec ces acteurs, nous allons monter "Les Justes" d'Albert Camus. La pièce sera notamment jouée à Liège en octobre prochain, au Théâtre de la Place. Egalement à Paris et à Marseille en 2013.Yacine croit être Palestinien et musulman, en fait, il est juif israélien, comment joue-t-on ce rôle ?
En fait, Yacine est quelqu'un qui jongle avec la vie et qui, dans le film, ne se définit à aucun moment comme musulman. Il aime son pays, sa mère, son père, sa famille mais comme il le dit lui-même, il vit loin et là-bas, ce n'est pas la même chose. C'est quelqu'un ayant de la distance et ayant dû grandir vite. Parce que quand on est loin de ses parents, on doit se débrouiller seul et quand on se débrouille seul, on apprend vite les choses. La maturité s'installe un peu plus vite.
Cette histoire de religion par rapport à Yacine, il n'en parle même pas. Cela ne rentre pas en cause. Croire en Dieu, ce n'est pas un événement héréditaire. Pour moi, c'est quelque chose que l'on a en soi, qu'on a dans le coeur. C'est entre soi-même et son propre coeur.
En arrière-plan, il y a le conflit israélo-palestinien, qu'en pensez-vous par rapport au film ?
Je pense que Lorraine Lévy est allé chercher le conflit le plus extrême, le plus violent. Cela fait soixante ans que cela dure et il n'y a toujours pas de solution. L'Occident, non plus, ne trouve pas de solution. Elle va chercher un extrême pour dire que dans cet extrême-là, il y a eu un échange d'enfants, il y a l'un qui est l'autre et l'autre qui est l'un. Finalement, au bout du compte, ce sont les mêmes parce qu'ils arrivent à s'accepter et à s'aimer comme ils sont. Et qu'ils n'ont rien raté de leur vie et qu'ils ne vont rien rater de leur vie. Si eux, ils peuvent y arriver dans ce film, les Flamands et les Wallons peuvent y arriver par exemple, tout le monde en fait.
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