• Entretien: Laurent Micheli - Even Lovers Get the Blues

    Par Michel Decoux-Derycke - Laurent Micheli vient du théâtre, il est aussi apparu comme acteur dans trois courts métrages et une série. Son premier long métrage "Even Lovers Get the Blues", dont il est le scénariste et le producteur, a été présenté l'année dernière lors du FIFF à Namur. Le film a plu à la presse, il a remporté le Prix de la Critique UCC-UPCB.
    C'est au Théâtre Royal de Namur que j'ai rencontré Laurent Michel pour parler de "Even Lovers Get the Blues".

    Pourquoi ce film ?

    A la base, c'est un projet destiné au théâtre, à la scène. J'ai eu envie de réunir six acteurs autour d'une thématique, à savoir la sexualité. Des acteurs que je connaissais, j'avais travaillé avec certains d'entre eux mais pas tous. J'ai écrit un scénario pour eux, j'ai créé des personnages pour eux à partir d'eux avec des allers-retours. On a beaucoup cherché avant.

    En fait pourquoi ? Simplement parce qu'aujourd'hui, dans ma génération, c'est très important de parler de sexualité, de délier les langues (sans mauvais jeu de mots !). Je trouve qu'il y a encore beaucoup de tabous, la sexualité est omniprésente dans la société mais personne n'ose en parler. Dès qu'on montre un sexe, un sein, les gens sont choqués parce que ce sont des choses qu'il ne faudrait pas montrer. Au contraire, il faut pouvoir montrer, pouvoir débattre, pouvoir en parler. Il y a une sursexualisation de tout, dans la pub, dans les médias. Il y a truc très hypocrite par rapport à ça.
    Je sens que, dans ma génération, les gens ne savent plus comment faire avec ça. Comment s'en sortir ? Il y a une facilité à avoir accès à des applications de rencontres, on peut changer de partenaire toutes les trois minutes si on veut et en même temps, il y a une perte totale d'engagement, de spiritualité. J'avais envie de parler de ça, j'avais envie d'avoir des trajets de personnages en quête identitaire, qui cherchent une forme de liberté, qui cherchent à se libérer, à libérer leurs corps.

    Laurent Micheli

    Etait-ce plus facile parce que vous connaissiez vos acteurs ?

    Il y en a un que je ne connaissais pas du tout,  je l'ai engagé sur casting. Les trois filles, j'avais déjà travaillé avec elles. Chez les garçons, , il y a en deux que je connaissais un petit peu de l'INSAS.
    Le processus a été assez long, cela a été une bonne chose que ce soit lent. Nous sommes rentrés dans une forme de complicité, une grande confiance qui s'est instaurée. Je pars du principe qu'il faut pousser les acteurs à se dépasser tout en respectant absolument leurs limites. Cela a toujours été le contrat entre eux et moi. Je n'ai rien fait qu'ils ne voulaient pas faire. Par contre, j'ai proposé des choses que je trouvais pertinentes, osées et que je les sentais capables de faire. On y est allé, je suis heureux de la relation que nous avons eue et de la confiance qu'ils me donnaient.

    Vous partez du sombre vers la lumière, de la ville vers la campagne, expliquez-nous ?

    J'avais envie de partir de quelque chose de très citadin, d'assez nocturne. Parce que je voulais que ce film soit un geste d'espoir. Je voulais que cela aille vers la lumière. C'est ça, des personnages qui avancent, qui évoluent, qui sont dans la quête. Je ne voulais pas clôturer sur quelque chose de pessimiste, de sombre. J'avais envie que les corps se libèrent, c'est l'été. Mettre les corps face aux éléments.

    La musique est importante.

    Effectivement, il y a beaucoup de musique. J'aime beaucoup la musique, de manière générale. J'écoute beaucoup de musique, j'écris aussi avec de la musique. Là, j'ai travaillé principalement avec deux compositeurs belges. Nous avons composé ensemble. J'avais envie d'avoir un traitement très pop, très coloré, très moderne, très actuel. Comme moi j'ai l'impression de vivre ma vie et de voir les gens autour de moi.

    Pourquoi ce titre en anglais ?

    D'abord parce que c'était le titre pour le projet théâtre et parce qu'en français, cela donnerait: même les amoureux ont du vague à l'âme, cela ferait un peu pompeux. C'est aussi un petit clin d'oeil à Gus Van Sant et "Even Cowgirl Get the Blues".

    Lire aussi la critique de Even Lovers Get the Blues
    Lire aussi l'entretien avec Adriana Da Fonseca et Gabriel Da Costa

    « Entretien: Gérard Pautonnier - Grand FroidEntretien: Adriana Da Fonseca et Gabriel Da Costa - Even Lovers Get the Blues »
    Partager via Gmail

    Tags Tags : , , , , ,