• Entretien: Xavier Seron et Jean-Jacques Rausin - Je me tue à le dire

    Par Michel Decoux-Derycke - Xavier Seron est réalisateur et scénariste. Il débute au cinéma, en 2005, avec le court métrage "Rien d'insoluble". Quatre autres suivront ainsi que le documentaire "Dreamcatchers" en 2014. "Je me tue à le dire" est son premier long métrage. Il a remporté plusieurs prix dans différents festivals ainsi que le Magritte 2016 du meilleur court métrage et le Magritte 2017 du meilleur scénario.
    Jean-Jacques Rausin est acteur, il a débuté dans "Rien d'insoluble", cité plus haut. Il joue dans une vingtaine de courts métrages, sept longs métrages dont "Je me tue à le dire". On le retrouve aussi dans la série "Ennemi public" où il joue le rôle du policier Michaël Charlier. Il vient de remporter le Magritte 2017 du meilleur acteur.
    Je les avais rencontré tous les deux, lors de la présentation de "Je me tue à le dire", au FIFF à Namur.

    Xavier Seron, d'où vient l'idée du film ?

    C'est un peu le prolongement des courts métrages que j'ai fait avant. Le film reprend le titre de mon tout premier court métrage que j'ai fait à l'IAD, il n'était pas destiné à sortir des murs de l'école et qui était déjà une sorte de réflexion à propos de la mort, sur le ton de l'humour grinçant.

    Le fait que Jean-Jacques était déjà là au tout début n'a-t-il pas aidé ?

    Dans tous mes films, Jean-Jacques s'y retrouve. Comme chaque fois, l'expérience est plutôt plaisante. On récidive. Du coup, pour le long, le personnage s'est vraiment construit en ayant Jean-Jacques en tête. Avoir quelqu'un en tête, c'est à double tranchant. C'est bien aussi d'écrire un personnage sans avoir d'idée préconçue, de pouvoir s'ouvrir à la surprise. En même temps, c'était très intéressant de pouvoir travailler ce personnage avec Jean-Jacques. Son personnage est un cousin éloigné des personnages qu'il avait campé dans mes courts.

    Jean-Jacques Rausin, pourquoi tournez-vous souvent avec Xavier Seron ?

    Je reprendrais les propos de Xavier. A partir du moment où l'expérience était chaque positive, qu'il a à chaque fois des propositions intéressantes, pourquoi pas ? C'est ce qui est sympa, un personnage se construit, il est le cousin de l'autre et ainsi de suite. C'est super intéressant d'aller de plus en plus loin. je ne me lasse pas, je suis content donc je continue avec Xavier.

    Xavier Seron et Jean-Jacques Rausin

    Xavier, vous voulez ajouter quelque chose ?

    Ce qui est intéressant, c'est quand on se connaissant, c'est un gros gain de temps aussi. A plein d'occasions, on n'avait même pas besoin de vraiment se parler. Un regard, des fois, suffit pour qu'on se comprenne. Cela permet d'aller vachement plus loin. Je me permets de demander à Jean-Jacques plus de choses alors qu'avec un autre, je prendrais plus de gants. Je mettrais un peu plus de temps pour y arriver avec un comédien que je ne connaîtrais pas. C'est un petit avantage.

    Jean-Jacques, vous refusez de temps en temps les propositions de jeu de Xavier ?

    C'est très simple, ce n'est pas que je refuse, je fais les gros yeux, parfois je dis oh mais... Et puis, il suffit qu'il me caresse dans le sens du poil (rires).
    C'est bizarre, des fois, je demande d'aller plus loin et je me rends compte alors que c'est trop loin. Je n'ai pas l'impression de refuser des trucs.

    Xavier, pourquoi le noir et blanc ?

    C'est vraiment une question de goût. J'adore le noir et blanc. Ce sont surtout des photographes qui m'inspirent pour l'image: Anders Peterson, Dedo Moriama, ... Ils travaillent des noirs et blancs très contrastés. En fait, ça permet un travail sur la texture, sur le côté graphique des choses. Quand je dois d'expliquer le noir et blanc, je prends cette image d'un paysage et on prend le même paysage sous la neige, c'est le même paysage et quand il a neigé, il y a des choses qui apparaissent qu'on n'aurait pas vu et qui disparaissent. C'est une métamorphose qui est magique. C'est ça, le noir et blanc. Cela fait surgir des choses que l'on ne verrait pas en couleur.

    Le choix de Myriam Boyer ?

    Elle a lu le scénario, elle s'est dit qu'on pourrait se voir. A ce moment-là, elle était du côté d'Avignon, nous, on venait de quitter Avignon, j'ai dit qu'on devait y retourner. Et V-voilà ! Elle avait vraiment envie de faire ce film, elle voyait très bien où je voulais aller. Elle savait que ça n'allait pas être une partie de plaisir pour elle.

    Jean-Jacques, votre avis sur Myriam Boyer ?

    Je vais être honnête. J'avais vu son travail surtout dans le film de Blier, "Le Bruit des Glaçons" et j'avais évidemment vu "Série noire". Comme comédien de bientôt quarante ans, j'ai toujours été fan de Patrick Dewaere et quand on m'a parlé de Myriam qui avait joué avec Patrick, ça m'a touché.
    Lors du tournage, elle s'est avéré une super partenaire. C'est une dame qui connaît bien le métier et puis, elle est adorable sur le plateau. C'est un peu une maman.

    Xavier, les conditions de tournage ?

    Le tournage en lui-même s'est bien passé, il y avait une bonne ambiance, chacun était attentif à l'autre. Par exemple, Serge Riaboukine qui, de façon subtile, remettait Jean-Jacques dans le cadre. Non pas que Jean-Jacques n'en est pas capable mais il était tellement concentré sur son personnage qu'il en oubliait le cadre.
    Pour ce qui est des finances, cela a été difficile. On a tourné une moitié, cela s'est arrêté pendant quasi un an. On a repris avec la même équipe, celle-ci était vraiment formidable parce qu'elle était au rendez-vous, un an après. Vous imaginez les mêmes comédiens, la même équipe. Ce n'est pas juste le discours on s'aime tous, je tiens à insister là-dessus, c'est tellement vrai. Si je n'avais pas eu tous ces gens autour de moi, le film ne serait pas là.

    C'est important que "Je me tue à le dire" soit montré en festival (NDLA: le FIFF à Namur en 2015) ?

    C'est triplement important. D'abord c'est une petite histoire qu'on vit avec le festival. "Rien d'insoluble", mon premier court métrage, a été présenté ici en 2005. C'est gai de revenir avec un long. Et puis, c'est formidable de le montrer au public, c'est un premier bain, on ne pouvait rêver mieux. Ensuite, on espère que, grâce au festival, le film soit mis en lumière, qu'il puisse vivre. Au moins, d'avoir une petite fenêtre de diffusion.

    Lire aussi la critique du film Je me tue à le dire

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