• Entretien: Vincent Garenq - L'Enquête

    Par Michel Decoux-Derycke - Vincent Garenq est un réalisateur et scénariste français. Il débute dans le cinéma avec le court métrage "Une vie à deux" en 1992. C'est en 2008 qu'il réalise "Comme les autres", son premier long métrage. Suivra trois ans plus tard "Présumé coupable", film avec lequel le Prix Claude Chabrol au Festival du Film Policier de Beaune.
    Je l'ai rencontré à Bruxelles où il était venu présenter "L'Enquête". Entretien avec un homme aussi sympathique qu'intéressant.

    Pourquoi ce film ?

    Parce que je voulais faire un film sur la finance. J'ai lu plein de bouquins sur la finance et c'est un peu comme Les Cahiers du Cinéma, on lit et à la fin, on s'aperçoit qu'on n'a rien retenu de ce qu'on a lu.
    A un moment, je suis tombé sur le livre de Denis Robert. J'ai vu un personnage particulier, singulier, qui s'aventure dans une enquête sur une institution financière qui assure les échanges entre toutes les banques. Après, j'ai découvert son univers. Les livres qu'il a écrit sur Clearstream, les affaires politiques. Ce n'est pas un journaliste comme les autres. Qui dit plus les choses sans peur des procès. Il est monté en puissance en s'attaquant à la finance. Et là, il en a pris plein la gueule. Des procès, des procès, encore des procès. En plus, son histoire est venue se mélanger à celle du juge Van Ruymbeke, une figure emblématique de la justice en France. Un juge populaire, qui est toujours sur des histoires compliquées, sur la politique, contre le pouvoir. C'est aussi un personnage très aimé des Français. Leurs routes vont se croiser pour finir en bouquet final avec l'affaire Clearstream 2, plus connue. Ce scandale politique où on soupçonne Dominique de Villepin d'utiliser des listings falsifiés pour démolir son rival Nicolas Sarkozy.
    Tout cela faisait une histoire un peu thriller, haletante et aussi cela parle de notre époque, de l'opacité financière, de l'impossibilité pour les juges d'enquêter quand ils se heurtent au secret défense.

    Vincent Garenq

    Un documentaire n'aurait-il pas été plus indiqué ?

    Moi, je suis un réalisateur de films, je fais de la fiction. Je n'ai pas envie de faire du documentaire. Par contre, il y a une démarche documentaire dans mes films. J'aime raconter des histoires pré-existantes. Cela permet d'écrire des scénarios plus originaux. Je n'aime pas les scénarios de scénaristes, un peu convenus.

    Vous avez écrit le scénario avec Denis Robert ?

    Denis, quand je l'ai rencontré, il était rincé. Il était fatigué de tout ça. Cela faisait dix ans qu'il parlait de ces histoires. Il a écrit trois livres, une BD en quatre tomes, il a fait des documentaires. Il n'avait plus envie d'écrire une ligne là-dessus. Par contre, il était consultant. Quand j'avais un souci, je l'appelais. Il m'a aiguillé, il m'a fait rencontrer des gens. Mais c'est resté quelque chose de lointain. Il m'a laissé une liberté totale.

    Comment s'est fait le casting ?

    Gilles Lellouche, j'y ai pensé en écrivant. Charles Berling, il y avait une évidence physique. Il y a une véracité dans le casting même si on n'est pas dans l'imitation, ni dans la copie. On s'est inspiré du réel. Laurent Capelluto, qui joue Lahoud, a remporté le casting haut la main alors qu'il y avait, en face de lui, plein d'acteurs libanais. Eric Naggar, qui joue Gergorin, c'était une évidence.

    Que diriez-vous aux lecteurs de 6néma pour qu'ils aillent voir le film ?

    L'histoire de Clearstream, c'est beaucoup plus important que celle de Sarkozy et de Villepin. C'est l'histoire d'un journaliste qui a enquêté sur la finance et qui s'est heurté à d'énormes difficultés. Parce que nous sommes dans un monde où la finance est opaque et nous sommes désarmés devant cela. C'est le vrai sujet du film. C'est l'histoire des difficultés d'un juge d'instruction aujourd'hui en France, pour enquêter dans des histoires de corruption. Cela parle du monde actuel, de notre époque. Il faut se réveiller, bousculer les hommes politiques pour que les choses changent. Parce que sinon, on va se laisser vraiment bouffer par la finance.

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