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Entretien: Pános H. Koútras - Xenia
Par Michel Decoux-Derycke - Pános H. Koútras est un réalisateur grec. Il s'est fait connaître, en 2000, avec son premier long métrage: "L'Attaque de la moussaka géante". Auparavant, il avait réalisé plusieurs courts métrages en Grèce, Grande-Bretagne et France.
C'est à Gand, lors du Film Fest, que je l'ai rencontré lorsqu'il est venu son dernier film: "Xenia". Entretien avec l'un des cinéastes du renouveau du cinéma grec.D'où vient l'idée de Xenia ?
Je voulais faire un film sur la jeunesse, plutôt sur l'adolescence. Aussi sur l'immigration parce que c'est un sujet qui me préoccupait beaucoup. Les deux ensemble, cela donne le film.
Xenia signifie l'hospitalité envers les étrangers. Dans les années cinquante, avec le boom économique, le gouvernement grec a créé une série d'hôtels de luxe, partout dans le pays, dénommés Xenia. Ils sont maintenant abandonnés. Donc l'hôtel que vous voyez dans le film est un vrai hôtel, un des quarante laissé en déshérence.Mais les deux jeunes gens du film ne sont pas vraiment des immigrés puisqu'ils sont nés en Grèce.
En Grèce, on les considère comme immigrés parce qu'on applique le droit du sang, pas celui du sol. Ils ne pourront jamais devenir Grecs. Jamais, jamais. C'est une des législations les plus dures en Europe. Vous pouvez naître en Grèce, vous pouvez aller à l'école, votre première langue est le grec mais vous ne pourrez jamais avoir la nationalité grecque.
Toutefois, les enfants d'immigrés sont protégés par une loi européenne pour les mineurs. Mais à partir de l'âge de dix-huit ans, ils sont expulsables.
Pourquoi avoir centré l'histoire sur deux frères ?
C'est quelque chose qui me tenait à coeur. La fraternité, l'idée de famille. Que ce soit des liens de sang ou des liens créés. Je voulais parler de cela. Ce sont deux frères différents. Ils viennent de la communauté albanaise, le plus jeune est homosexuel affiché et son grand frère n'assume pas cela. Le plus jeune est doublement minoritaire en tant qu'albanais et homosexuel. Mais c'est un battant, il est aussi très intelligent.
Comment avez-vous choisi les acteurs ?
Ce sont des Albanais de la deuxième génération. Ce sont aussi des jeunes qui voulaient être acteurs. Le plus jeune, Kostas Nikouli, venait de finir le lycée et allait passer les examens pour entrer dans une école de théâtre, l'aîné, Nikos Gelia, était déjà dans une école de théâtre. Toutefois, il a fallu un an, même plus qu'un an pour les trouver.
Vous utilisez les chansons de Patty Pravo, qui est-elle ?
Patty Pravo est une très grande diva italienne avec une carrière s'étalant sur les quarante dernières années en Italie. Ce qui était intéressant, c'est qu'en Albanie, lors de la dictature communiste et de la fermeture de ses frontières, le seul espace de liberté était l'écoute de la radio italienne. Tous les Albanais ont grandi avec la musique populaire italienne. C'était la voix de la liberté.
L'idole de la mère des deux héros, qui voulait être chanteuse, était Patty Pravo. Alors les enfants suivent le rêve de leur mère.
Votre film est une sorte de foot movie puisque tout se passe à pied.
Oui, c'est vrai. Cela donne cette impression parce qu'ils sont toujours en mouvement. La première partie se passe à Athènes, la deuxième partie, ils sont en route et la dernière partie, ils sont à Salonique. Ils ne voyagent vraiment qu'au milieu du film. Mais même, à l'intérieur des villes, ils voyagent. Ils bougent tout le temps. Dans une grande ville, on voyage, on bouge, on rencontre. Une grande ville, c'est comme une grande forêt.
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