• Entretien: Pascal Thomas - Valentin Valentin

    Par Michel Decoux-Derycke - Pascal Thomas est acteur, scénariste, réalisateur et producteur. Sa carrière cinématographique a débuté début des années 70. Sa filmographie est riche de vingt films dont "Les Zozos", "Le Chaud Lapin", "Les Maris, les Femmes, les Amants" ou encore "La Dilletante". 
    C'est à Bruxelles, où il est venu présenter son dernier film: "Valentin Valentin", que je l'ai rencontré. Entretien avec un homme offensif et disert.

    Pourquoi avoir adapté le roman de Ruth Rendell: "Tigerlily's Orchids" ?

    Parce que le roman policier, plus exactement le roman criminel dans le cas de ce livre, permet de découvrir les âmes. Le fond de l'âme des protagonistes. Il présentait un caractère qui me plaisait, il y avait beaucoup de monde. C'était voisin de films que j'ai fait comme "Mercredi, folle journée" ou "Confidences pour confidences". Tous ces films nombreux. Les gens disent film choral, moi, je dis film nombreux. A partir de là, je pouvais remodeler l'histoire selon les acteurs que j'avais choisi. Selon ma fantaisie. 

    Donc vous aviez déjà dans la tête des acteurs ?

    Non. Si vous adaptez le livre avec une fidélité pointilleuse, vous avez à peu près huit heures de film. Contrairement à un livre, le récit cinématographique doit filer. Le film se crée au moment où on choisit les personnages. Il s'enrichit de ce que sont les acteurs. Surtout il se modifie considérablement au tournage, même au montage. J'ai toujours pratiqué comme ça. La vie du film fait le film. 

    Pascal Thomas

    Comment s'opère le choix des acteurs ? 

    Je les choisis très, très différents. Il faut pouvoir les distinguer, les reconnaître, ne pas les confondre. Aucun ne se ressemblera à tout point de vue d'ailleurs. Sur la démarche, sur les vêtements, sur le physique, sur la voix. L'acteur n'est pas toujours à l'écran. Il est aussi en off. Si en off, quelqu'un parle, il faut que le spectateur puisse savoir qui c'est. Toutes les histoires se poursuivent. Il y a des acteurs qu'on abandonne un moment mais ils reviennent. Il faut qu'ils reviennent au bon moment. C'est assez complexe comme construction. 

    Pour le rôle principal, vous avez pris Vincent Rottiers, c'est plutôt surprenant, non ?

    Pour le rôle de Valentin, je cherchais un jeune premier. Tous les jeunes premiers qui sont proposés par le cinéma aujourd'hui, qui font Saint-Laurent par exemple, ils ne me plaisent pas. Rien qu'à les voir, je commence à m'endormir. Vincent Rottiers, je lui ai proposé le rôle du petit voyou. Il m'a dit qu'il préférait l'autre rôle. Je n'y avais pas pensé. Je me suis dit alors que j'allais le transformer. Donc on lui a fait découvrir un monde qu'il ne connaissait pas. 
    Cerise sur le gâteau, il fallait lui donner une mère. Alors on lui a donné Arielle Dombasle. Une mère très égoïste, en même temps, amusante. Très cocasse. C'est une grande actrice. Réussir le personnage en si peu de scènes, quatre exactement, c'est bluffant.

    Vous aimez faire des films nombreux, pourquoi ?

    Il y a une explication psychanalytique. Mon père est mort quand j'étais jeune, ma mère ne pouvant s'occuper de moi, elle m'a mis en pension. Depuis l'âge de sept ans, j'étais en pension. L'été, j'allais en colonie de vacances. Je suis très à l'aise quand il y a du monde. Je ne suis pas dérouté. Le tête-à-tête me convient aussi, je suis tellement bavard. Mais plus il y a de monde, mieux je me porte.

    Particularité, vous n'avez jamais eu aucun prix, comment vivez-vous cela ?

    Je ne suis pas frustré. J'ai juste eu un hommage de la Société des Auteurs et le Grand Prix de l'Académie Française. Pas de Prix Jean Vigo, pas de Prix Louis Delluc, pas de nomination aux César. Jamais Cannes. J'ai proposé à quatre reprises un de mes films, je n'ai jamais été retenu. Une fois, je pensais que "Le Grand Appartement" aurait pu être sélectionné mais le choix s'est porté sur un autre film, une ânerie. A l'époque, je faisais partie du Conseil d'admistration de Cannes, je leur ai dit, cela a provoqué la colère de la momie Gilles Jacob. Heureusement, la momie s'en va, bien remplacée par Pierre Lescure. Il va donner un coup de jeune, il a des goûts plus variés.

    Vous avez aussi présidé la Commission d'avance sur recettes où vous vous êtes singularisé.

    Exactement. Pour moi, une bonne cinématographie, c'est une cinématographie où toutes les générations travaillent. Il y avait une avance au premier film donc j'ai créé l'avance au dernier film, l'ultima opera, sur les conseils d'un cinéaste italien Vittorio Cottafavi, spécialiste du péplum. Beaucoup de vieux réalisateurs sont arrivés et pratiquement tous l'ont eu. Malheureusement, comme je suis un dilettante, je ne l'ai pas fait inscrire dans les textes.

    Avez-vous des projets de films ?

    J'ai un film en route qui s'appelle "Le voyage en pyjama". Une histoire un peu cocasse d'un type qui va retrouver tout son passé: anciennes femmes, fiancées, copains. Encore un film nombreux. Maintenant, il s'agit de trouver les financements. Quel acteur va l'interpréter ? J'ai très envie de tourner avec Frank Dubosc. Il faudrait faire un travail un peu comme avec Vincent Rottiers.

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