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Entretien: Patrick Ridremont - Dead Man Talking
"Dead Man Talking" est le premier long métrage de Patrick Ridremont. Jusque maintenant, on le connaissait comme homme de théâtre, jouteur de la Ligue d'impro, animateur télé, voix-off, etc... En impro, il fut notamment champion du monde, c"était en 1999 au Québec. A la télé, sur la RTBF, il a animé des émissions comme "100 % télé", "Oh mon bateau", "60 secondes", "Ceci n'est pas le bétisier 2004", "Ceci n'est pas de la tévé", Sur Canal+, c'était à travers des capsules, telles que "TVA", "Night Shop", "A louer", ou "Ring Ring", qu'on a pu le voir. Désormais, c'est le cinéma qui l'occupe.
Comme William Lamers, le héros de son film, Patrick Ridremont parle, parle et parle encore.Pourquoi faire un film ?
Je suis un raconteur d'histoires. J'aime bien écrire pour le plaisir d'écrire. A la maison, j'ai plein de débuts de scénario, des débuts de roman. Je suis un écrivain de zakouskis, j'écris des choses très courtes. Un moment donné, cette histoire qui était un court métrage, j'avais envie de la raconter. Mais cela impliquait que j'aille jusqu'au bout. Certaines personnes m'ont dit que je devais en faire un long. Je me suis piqué au jeu. Tout d'un coup, je me suis dit de manière logique, il faut aller au bout du processus. Le boulot a fait qu'il fallait que je transforme ça en film. Au départ, je ne me considérais pas comme réalisateur, plutôt comme raconteur d'histoires.
Comment l'idée est-elle venue ?
J'ai trente-deux ans, je vais en avoir trente-trois, l'âge du Christ. Je me dis: tiens, je vais m'écrire un court métrage où je meurs en croix. C'est le départ. Comment trouve-t-on un mec condamné à mourir actuellement ? Un condamné à mort ! On va le mettre sur la table américaine de poison. Puis comme c'est un comédien raté qui n'est pas entré dans la lumière, il profite de cette espèce de Star Academy de la peine de mort.
En fait, tout était dans le court métrage. En faisant un long, j'ai développé les idées. Par exemple, j'ai pu mettre un quart d'heure de silence au début du film.Etre à la fois acteur et réalisateur, en plus pour un premier film, cela n'a-t-il été difficile ?
Le plus difficile était de se demander si je faisais les deux ou je faisais soit l'acteur soit le réalisateur. Pour la petite histoire, à un moment donné, j'étais prêt à abandonner le rôle. Puis j'ai mis fin à cette valse-hésitation. Je reconnais une espèce d'envie de raconter cette histoire et de jouer dedans. Dieu que j'aime ce métier d'acteur ! Je n'ai jamais une aussi belle proposition que celle que je me suis faite.
Après, on sait qu'il y a des difficultés. Mais elles ont été surmontées parce qu'on m'a épaulé du début à la fin. J'étais extrêmement bien soutenu. J'ai aussi fait confiance.Vous êtes connu comme humoriste, avec ce film, vous prenez tout le monde à contrepied, c'était voulu ?
Il y a une envie de dire un peu qui je suis. Je ne fais pas un film d'une heure quarante pour bluffer tout le monde et qu'on se dise: "ah, mon Dieu, on ne le connaissait pas comme ça". L'humour est quelque chose que je maîtrise de manière chirurgicale, je suis un médecin de l'humour. J'en connais un peu les rouages. En revanche, je sais que je n'aurais pas la chance, dans ce pays, de faire énormément de films. Si je ne devais en faire qu'un, je voulais que ce soit celui-là.
J'y ai mis beaucoup de choses. J'ai mis, discrètement, une dédicace à mes enfants. Cela fait plaisir de ne pas avoir fait une comédie. J'aimerais jouer dans une comédie mais je crois que je ne pourrais pas en réaliser une.Comment avez-vous composé le casting ?
Virginie (NDLA : Efira), quand j'écris le court métrage, nous sommes mariés, je pense à elle en nana froide et méchante. Ce qu'elle n'est pas dans la vie. Olivier Leborgne, je voulais qu'il soit dans le film. Il y avait deux rôles possibles pour lui: le gouverneur ou l'assistant du gouverneur. Christian Marin (NDLA: décédé le jour de notre entretien), je l'ai rencontré à un tournoi de pétanque à Spa, il était d'une gentillesse incroyable. Il a accepté immédiatement ma proposition. Il était heureux de jouer le rôle du curé. Denis M'Punga, qui joue le rôle du gardien black, je l'ai rencontré il y a dix ans lorsque j'ai fait des sketches à Canal+. J'ai travaillé avec lui et je me suis dit qu'un jour, je l'engagerais. Pauline Burlet, il faut savoir qu'au moment où j'écris le film, elle a neuf ans, je la vois dans un court métrage et je la trouve extraordinaire. Je la voulais dans mon film. Mais il fallait qu'elle ne soit pas trop âgée pour que son rôle ne change pas de nature. C'était limite au moment du tournage. Jean-Luc Couchard, c'est un casting de dernière minute. François Berléand, il a accepté en deux jours.
Comment définir le film ?
Je ne voulais pas qu'on puisse le situer. Je voulais que ce soit intemporel. Je déteste des films avec GSM. Je déteste cette facilité à pouvoir résoudre des énigmes sans se déplacer. C'était tellement beau l'époque où il fallait trouver une cabine téléphonique. Je voulais que cela soit de la ligne claire, presque graphique. Que le curé ait un costume de curé, que le taulard soit habillé en taulard avec une marinière, etc... Cela se passe maintenant mais dans un monde qui a arrêté d'évoluer il y a vingt ans.
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Tags : Dead Man Talking, Patrick Ridremont, Télévision, Impro, Théâtre