• Entretien: Patrice Toye - Little Black Spiders

    Par Michel Decoux-Derycke - Patrice Toye est une réalisatrice belge. En 1998, elle fait son premier long métrage: "Rosie". Le film remporte un succès immédiat au Festival de Berlin et de Toronto. Il sort dans douze pays parmi lesquels les Etats-Unis, le Japon et la France. "Rosie" est récompensé dans bon nombre de festivals internationaux: Meilleure Réalisation au Festival International de Flandre à Gand, Meilleur Film de l’Année en Norvège, Prix du Public au Festival de  Bergame. Son deuxième long métrage, en 2008, "(N)iemand" remporte le NHK International Filmmakers Prize au Festival de Sundance. Il est sélectionné par les festivals de Venise, Hambourg, Sao Paulo, Gijon, Copenhague, Prague et le Festival de Corée du Sud.

    Comment avez-eu l'idée du film ?

    Il y a dix ans, j'ai lu un petit article dans un journal où on parlait du sujet. Tout de suite, cela m'a fasciné. Cela m'a pris longtemps pour trouver ma voie dans ce sujet. Parce que je ne voulais pas que le film soit une anecdote, un témoignage qui attaque ou culpabilise. Je voulais que cela aille au-delà. Je voulais aussi que ce soit un film universel. C'est pour cela que cela m'a pris dix ans.

    Patrice Toye

    A l'époque où vous situez le film, le poids de l'Eglise catholique n'était-il pas important en Flandre ?

    Bien sûr. Moi-même, j'étais élève dans une école catholique et une de mes condisciples s'est suicidée parce qu'elle était enceinte de deux mois. Elle avait honte de le dire. Je suis très contente que les temps aient changé. Il y a des possibilités d'en parler, on n'est plus stigmatisé. Dans le temps, on était gêné, on ne savait pas quoi faire. C'était une chose assez délicate.
    Pourtant, je suis sûre que cet endroit secret s'est créé, au départ, avec de la bonne volonté. Mais le poids de l'Eglise catholique a fait que cela a dérivé. Dans le temps, on suivait les règles. Le droit de l'enfant n'existait pas encore dans les années septante.


    Comment avez-vous choisi les actrices ?

    Je trouve qu'elles sont super. Ce sont toutes des filles jeunes, fraîches mais qui sont toutes d'excellentes actrices. Elles jouent formidablement. J'ai pris beaucoup de temps pour les trouver. J'ai fait tous les théâtres où des jeunes jouent. J'ai fait beaucoup de castings. J'ai vu au moins deux cents filles."
    "Sur le tournage, cela s'est bien passé entre elles. Il n'y avait pas de jalousie. Nous avons fait beaucoup de répétitions avant le film. Nous avons travaillé ensemble sur les scènes, nous avons improvisé. Comme ça, tout le monde a trouvé sa place.


    La fin est à la fois optimiste et pessimiste, c'était voulu ?

    Je l'ai inventée avec ma co-scénariste. Le thème du film est lourd mais j'espère que beaucoup de spectateurs iront voir le film parce qu'ils vont rire, parce qu'ils vont sentir la belle amitié entre les filles. Même si à la fin, il se passe des choses assez tragiques, il y a aussi beaucoup d'espoir. Les filles ne sont pas des victimes. Elles sont fortes.

    Vous avez fait deux films avant celui-ci, y a-t-il des thèmes communs entre eux ?

    Ils sont très différents. Mais les mêmes choses reviennent: chercher sa propre identité, l'amour, l'amitié. Je joue aussi avec le surréalisme ce qui est très belge. Cela revient toujours dans mes films.

    Comment se fait-il que le cinéma flamand n'est pas vraiment connu dans la partie francophone de la Belgique ?

    Je me pose la question. Moi, je vais voir les films des frères Dardenne, de Joachim Lafosse, etc ... J'aimerais que les gens fassent comme moi. Que les Flamands aillent voir les films francophones et vice-versa. Même à la télévision, les Flamands ne regardent pas la RTBF et les francophones ne regardent pas la VRT. C'est dommage !
    Sur "Little Black Spiders", une partie de mon équipe était francophone et nous nous sommes tous bien entendus.

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