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Entretien: Fabrice du Welz - Alleluia
Par Michel Decoux-Derycke - Fabrice du Welz est un réalisateur belge. Il a étudié au Conservatoire d’Art Dramatique de Liège puis à l’INSAS. En 1999, il réalise "Quand on est amoureux c'est merveilleux", un court métrage remportant le grand prix du Festival de Gérardmer. En 2005, son premier long métrage, "Calvaire", est sélectionné à la Semaine de la critique du festival de Cannes. Trois ans plus tard, "Vinyan" est repris en sélection officielle à la Mostra de Venise. En 2012, il réalise "Colt 45" qui sortira seulement en 2014 après moults vicissitudes.
C'est à Namur, lors du FIFF, que je l'ai rencontré pour discuter de son quatrième long métrage "Alleluia".Pourquoi cette histoire des Tueurs de la lune de miel vous a-t-elle intéressé ?
Tout cela est parti un peu étrangement. J'ai rencontré Yolande Moreau dans un Festival, j'ai voulu écrire pour elle. La même semaine, j'ai revu "Carmin profond" de Ripstein qui prend le faits divers et qui l'ancre dans son Mexique natal. Il en fait un film flamboyant, très personnel. Je me suis dit: fais la même chose et adapte-le dans tes Ardennes. C'est parti comme ça.
J'ai creusé et c'est en creusant que certaines choses se sont mises en évidence notamment cette histoire d'amour et d'aliénation. Cette folie à deux, tout cela m'a intéressé et passionné au plus haut point.Le fait que cette histoire a déjà été adaptée plusieurs fois au cinéma ne vous a-t-il pas inhibé ?
Non, pas du tout. C'est une libre adaptation. C'est comme une tragédie, une pièce de théâtre. Vous reprenez un élément fondateur et puis vous le retraversez. Je suis convaincu que d'autres s'empareront de cette histoire parce qu'elle a quelque chose d'universel. La preuve, c'est qu'elle a traversé le temps et fasciné énormément de monde.
Comment s'est fait le casting ?
Il a été long. Il a fallu composer, choisir. J'avais des contraintes. Canal + me demandait d'avoir une actrice française, les Belges me demandaient d'avoir un acteur belge. Donc j'étais, chaque fois, un peu emmerdé entre les uns et les autres. Un moment, j'ai décidé de faire exactement comme je le voulais. Trouver les bons acteurs, enfin ceux qui semblaient les mieux pour les rôles. Et puis j'avais envie d'avoir Laurent Lucas avec moi.
Tous vos films sont tournés en pellicule alors que cette manière de filmer est peu à peu abandonnée, que pensez-vous de cela ?
Le débat entre la pellicule et le digital ne fait que commencer. Je pense que petit à petit, on va revenir la pellicule. Christopher Nolan tourne de cette manière-là, Quentin Tarantino et Martin Scorsese aussi. Ce sont des amoureux du cinéma qui ont envie de travailler en pellicule.
De toute façon, je pense que le digital n'est pas encore au point pour le travail dans les basses lumières. Dans les pays francophones, l'acuité visuelle a baissé. On voit moins les images, moins les contrastes. Ce qui est terrible dans nos pays qui ont engendré des oeuvres absolument incroyables sur le clair-obscur et autres.
On dit toujours que la pellicule est plus chère, non, elle n'est pas plus chère. C'est pareil. En pellicule, la chaîne est plus longue. Il y a des accidents. On contrôle moins la chaîne. Qaund on tourne en pellicule, on a toujours la surprise des rushes. En digital, ce qu'on voit au combo, c'est l'image finale. Il y a moins de mystères, moins de surprises.
Vous tournez dans un certain genre de cinéma: le fantastique et dernièrement le policier, n'avez-vous pas envie de tourner dans un autre genre, par exemple la comédie ?
Pour moi, la comédie, c'est l'art suprême. C'est rare,les comédies réussies. Il y a un tempo et il faut être absolument génial pour réussir une grande comédie. Une comédie réussie à la Billy Wilder, c'est vraiment du bonheur. Malheureusement, je n'en suis pas capable aujourd'hui et ce n'est pas mon appétit.
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Tags : Alleluia, Fabrice du Welz, Laurent Lucas, FIFF, Namur, Yolande Moreau, Martin Scorsese, Christopher Nolan, Quentin Tarantino