D'où vient le prénom Yolin ?
C'est un prénom venant de l'Ile de la Réunion. Là-bas, c'est un prénom très répandu. Parce que, pour faire plaisir à toute la famille, on nous donne des prénoms à rallonge. Cela fait plaisir aux cousins, aux oncles, ...
Comment vous êtes-vous retrouvé dans "Bodybuilder" ?
Alors là, c'est une longue histoire. Déjà, j'ai eu la chance d'avoir le profil que désirait Roschdy. Bizarrement, il est venu me voir dans une compétition. C'était ma dernière compétition. En plus, je ne devais pas y aller. Comme quoi, le hasard ! J'ai accompagné un copain puis je me suis dis, je vais la faire. J'étais au bout du rouleau, j'étais vraiment fatigué, pas de bonne humeur. Roschdy est venu en me demandant si cela m'intéressait de tourner dans un film. Je l'ai envoyé balader.
Ma femme a discuté avec lui. Roschdy lui a dit que c'était moi qu'il voulait, avec mon caractère et ma voix. Donc ils se sont pris leurs coordonnées. Par après, il a fait des castings avec beaucoup de culturistes. Il a rappelé un an après en me disant de passer le casting. Ma femme m'avait déjà conditionné: "il faut prendre ta chance. Il n'y a pas de hasard dans la vie. Vas-y". Je suis venu et cela a bien fonctionné. J'ai accepté le rôle et il m'a mis entre les mains d'un maître de comédie.
En fait, il y a une similitude entre le culturiste et l'acteur puisqu'il faut se montrer sous son meilleur jour.
J'ai eu la chance d'être à l'aise devant les caméras. C'est là qu'il y a une similitude avec le sport. Le body-building, quand on monte dans l'arène, il n'y a rien d'autre qui compte. On ne regarde même pas ses concurrents. On vient se battre et on a des œillères. Là, c'est pareil. Quand je suis monté sur le plateau, j'ai quelqu'un en face de moi, on fait une réplique, je rentre vraiment comme si c'était ma vie réelle. Je rentrais pratiquement en transes.
Comment cela s'est-il passé avec Roschdy Zem ?
Il m'a vraiment conditionné. C'est un pédagogue hors-pair. Il aime les acteurs. Il est aussi acteur et en tant que réalisateur, il aime ses acteurs. Il connaît tous leurs points faibles. Il sait comment réagir pour nous booster. Avec moi, il savait qu'il fallait m'encenser. Moi, si on me dit c'est pas bon, ça m'énerve, ça me chauffe tout de suite. Je suis un caractériel comme beaucoup de sportifs. Alors Roschdy me disait: "génial, extraordinaire". Par contre, on recommence parce que tu as un petit rictus, il y a ça qui ne va pas. On refaisait la prise trois, quatre fois. Après, je me disais en moi-même: "toi, tu m'as eu" (sourire).
Le film retranscrit-il bien le milieu du body-building ?
Tout à fait. Roschdy a mis deux ans à faire ce film, il s'est documenté à fond. C'est un perfectionniste. Je n'avais rien à lui reprendre, pourtant, je suis dans le monde du body-building depuis quarante ans.
Il a vraiment retracé le quotidien d'un body-builder. C'est-à-dire l'entraînement. Quand on parle du body-building, on pense narcissisme, oui, ils se montrent en maillot de bain. C'est seulement une minute. Ce qui nous intéresse, c'est l'entraînement, c'est l'essence même du body-building. C'est quatre-vingt-dix pour cent de notre addiction. Et aussi le régime particulier. Très particulier. On mange beaucoup de protéines, on supprime les glucides, pas de sucre. On se met toute la famille à dos.
Le body-building est un des rares sports où on continue la compétition après cinquante ans, comment expliquez-vous cela ?
C'est qui a touché Roschdy. Au départ, il voulait faire le film avec une femme. En fait, il a choisi un homme et de plus de cinquante ans. Moi, j'ai 58 ans. Il s'est dit que c'était bizarre parce que c'est un sport qui ne ramène pas d'argent. Au contraire, on paye tout. On a juste droit à une coupe et deux, trois lignes dans le journal. Cela l'a touché. Surtout il se demandait comment, après cinquante ans, on pouvait être aussi addict à ce sport. Il a trouvé que c'était spécial et ça l'a intéressé.
Le sport ne m'a amené que du bonheur. C'est certain, cela a eu des répercussions sur la vie de famille. Mais il n'y a pas que le body-building. Tous les sportifs sont comme moi. Par exemple, celui qui fait du vélo, il n'y a que le vélo qui compte qu'il pleuve, qu'il neige ou qu'il fasse beau. C'est simplement la passion. Ce qui m'a arrêté, c'est tout simplement l'âge. Et le film bizarrement. La fiction m'a fait rentrer dans la réalité.
Grâce au film, vous accédez à la notoriété, comment le vivez-vous ?
Je le vis très bien. Je suis sur un petit nuage. Et puis la promotion, je ne savais pas ce que c'était. C'est hyper-fatigant. On n'arrête pas de prendre l'avion, le train. On va dans tous les coins de la France. J'adore quand même. Quand ce sera fini, le film sera vraiment fini. Je passerai à autre chose.
N'avez-vous pas envie de poursuivre dans le cinéma ?
Bien sûr. Mais ce n'est pas si évident. Ce n'est pas parce que j'ai fait un film que je vais faire automatiquement un autre derrière. Si j'ai quelque chose, j'espère, je le prendrai. Je signe des deux mains. En plus, si ce n'est pas comme body-builder, ce serait encore mieux. Je voudrais montrer que je sais jouer la comédie. Dans un film policier, par exemple.
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