• Entretien: Xavier Diskeuve - Jacques a vu

    Par Michel Decoux-Derycke - Xavier Diskeuve est un homme multi-tâches: journaliste, écrivain, scénariste et réalisateur. Avant son premier long métrage "Jacques a vu" sorti en ce début 2015, il a réalisé quatre courts métrages entre 2002 et 2009. Courts métrages qui ont fait le tour des festivals et remporté plusieurs prix.
    C'est à Namur, lors du FIFF, que j'ai rencontré Xavier Diskeuve. Entretien passionnant avec un homme passionné.

    Qu'est-ce qui fait qu'un journaliste ait envie de devenir réalisateur ?

    Cela a été un long parcours. J'ai toujours beaucoup aimé faire du théâtre. J'en ai fait pendant dix au Théâtre Universitaire de Liège. D'ailleurs, il y a des acteurs, toujours dans la troupe, qui sont dans mes films. 
    Un jour, je me suis mis à écrire des nouvelles. Cela a été mon passage à la fiction, j'ai transformé mes idées en petites histoires. J'ai gagné plusieurs concours. Mais j'ai remarqué que rien ne se passait, que personne ne les lisait. Aucun écho.
    J'ai alors rencontré Dominique Janne, le producteur de Benoît Mariage, à qui j'ai montré mes nouvelles. Il m'a dit que je pouvais faire un bon scénario de court avec et qu'il allait m'aider. Donc j'ai écrit un scénario et je l'ai réalisé, toujours selon la volonté de Dominique Janne. Ce premier court, avec un style un peu bizarre, a fonctionné et a tourné dans pas mal de festivals. A partir du deuxième, j'ai pu avoir une équipe plus solide et les choses se sont plus affirmées. Dans le journalisme, je travaillais dans l'éphémère et tout à coup, dans le cinéma, je travaillais sur un grand projet à moi. Vraiment à moi. 
    Et puis après quatre courts, il faut passer au long sinon on devient un vieux court métragiste. Vous allez tout le temps dans les mêmes festivals avec les mêmes programmateurs. On vous fait comprendre que l'on vous a assez vu. 

    Xavier Diskeuve © David Ameye

    Justement, d'où vient l'idée de ce premier long métrage ?

    Un soir dans mon lit, j'ai eu comme un flash. Souvent, on cherche de idées, elles ne viennent pas et puis, paf ! C'est ça la magie de l'imagination. Tout à coup, je vois mon personnage de Jacques, présent dans deux de mes courts métrages, ayant une apparition. Je le vois à genoux dans un bois. Des apparitions, quel beau sujet. De là, j'ai commencé à réfléchir, c'était une ligne intéressante. Les apparitions, je connais ça par ma famille. Dans les années trente, dix mille personnes venaient voir les voyants de Beauraing. Ils ont été interrogés cinq cent fois par des prêtres, c'était un truc de dingues. Aujourd'hui, qu'est-ce qui se passerait ? Le gars serait-il interné ? Lui ferait-on un scanner ? 
    J'ai essayé d'imaginer une histoire pouvant inclure ça dans la Wallonie d'aujourd'hui. Il fallait que cela ne se limite pas à des péripéties, pas un faux documentaire. L'idée du couple qui s'installe dans le village, la menace sur le village, tout cela est venu peu à peu. Il a fallu deux ans de gestation. 

    Comment avez-vous composé votre casting ?

    Il y a d'abord le casting de mes courts, je voulais être fidèle. Les rôles principaux, c'étaient eux. Le film était écrit pour eux. D'ailleurs, à un moment donné, on a failli perdre Christelle Cornil à cause des frères Dardenne. J'ai même dû essayer d'autres actrices au cas où. Cela aurait été intéressant parce que j'ai casté de super-actrices. Cela aurait été un film différent. Elles auraient apporté un touche intéressante chacune mais je perdais l'assortiment physique de Christelle avec François Maniquet. Cette espèce de côté british qu'ils ont tous les deux. 
    Le casting des rôles secondaires, cela a été un travail très gai. En même temps, il a beaucoup varié. Depuis longtemps, je dressais des listes de rôles secondaires. Avec ceux qui avaient tourné dans mes courts et dans ceux que j'avais produit. Olivier Leborgne et André Lamy, je travaille avec eux tous les jours dans Votez pour moi sur Bel RTL. Pour une fois, André Lamy n'imite pas, il a deux, trois répliques, je trouve qu'il a une belle tête de boulanger. 

    Vous avez tourné dans la région namuroise ?

    Effectivement. C'est une grande facilité de tourner dans un rayon de vingt kilomètres. Encore qu'il y avait beaucoup de décors, énormément. Beaucoup de déplacements, beaucoup de figurants: cent cinquante. On a aussi tourné au Lac de l'Eau d'Heure et dans les dépendances du château Valduc dans le Brabant wallon. 
    Nous avions trente jours pour tourner et on a eu un bol incroyable, il n'y a pas eu un jour de pluie. Juste une averse sur le coup de 18 heures alors que nous venions de finir. La Vierge a été avec nous, miracle !

    Y a-t-il déjà un projet de deuxième film ?

    Oui, j'ai quelques idées. Mais avant d'aborder le deuxième, je veux avoir les retours de "Jacques a vu". Pour savoir si je reste dans le même schéma de production, de casting. Et aussi, si ce premier long marche, avoir plus de moyens. 
    En fait, j'écris et inconsciemment, j'envisage tout de suite la matérialité des choses. Je suis aussi en repérage permanent. C'est excitant de voir un lieu, d'avoir envie de mettre un acteur dedans. Le décor dit le personnage. C'est ma façon de mettre en scène. 

    Lire aussi la critique de Jacques a vu
    Lire aussi l'entretien avec Christelle Cornil
    Lire aussi l'entretien avec Nicolas Buysse

    « Les Machins 2015: pas si petit que ça !Entretien: Christelle Cornil - Jacques a vu »

    Tags Tags : , , , , , , , ,