• Entretien: Virginie Despentes - Bye Bye Blondie

    Par Michel Decoux-Derycke - Plus de dix ans avec le film choc "Baise-moi", Virginie Despentes revient au cinéma avec "Bye Bye Blondie", dans les rôles principaux: Béatrice Dalle et Emmanuelle Béart Il était donc intéressant de la rencontrer. J'en ai eu l'occasion, c'était à Bruxelles.

    Pourquoi avoir attendu onze ans avant de réaliser un deuxième film ?

    J'ai écrit quelques romans. Cela a pris un peu de temps. J'ai réalisé un documentaire qui s'appelle "Mutantes (Féminisme Porno Punk)". Cela m'a pris une autre partie de mon temps. C'est long de financer un film et aussi de le terminer. Les histoires d'argent, ce n'est jamais facile. L'un dans l'autre, ces activités ont fait que j'ai dû attendre avant de réaliser "Bye Bye Blondie".

    Virginie Despentes

    Est-ce facile d'adapter ses propres romans ?

    Cela a son avantage parce qu'on connaît bien l'histoire. On sait ce qui nous intéresse à l'intérieur, quels sont les points forts et les faiblesses. Après, dans ma vie, j'aimerais adapter le roman ou le scénario de quelqu'un d'autre. Ou écrire un scénario directement. Mais surtout je préfèrerais adapter l'histoire de quelqu'un d'autre. Parce que quand j'ai envie d'écrire une histoire, j'ai tendance à écrire un roman. Comme je voudrais réaliser un autre film, j'aimerais adapter une histoire qui ne soit pas de moi.

    Dans votre roman, c'est un garçon et une fille. Dans le film, ce sont deux filles. Pourquoi ?

    Cela m'intéressait plus de faire une comédie lesbienne et romantique plutôt qu'une comédie hétéro. Il y en a beaucoup, des comédies hétéro. Mais aussi, c'est venu d'une discussion avec Béatrice Dalle. J'avais envie d'écrire le scénario à partir d'acteurs ou d'actrices. Je ne trouvais pas d'acteur qui m'inspire pour le rôle d'Eric, son comparse. Et c'est Béatrice Dalle qui m'a suggéré de penser à des comédiennes, qu'on s'en foutait que ce soit une fille ou un mec.
    Dès que j'ai pensé Dalle-Béart, ça a fait tilt. Si je fais du cinéma, c'est vraiment pour travailler avec des gens. Pas forcément des acteurs mais des gens qui vont incarner le film. Dalle-Béart, c'était un rêve pour moi. Plus que tout.

    Comment Béatrice Dalle et Emmanuelle Béart ont-elle réagi à cette idée ?

    Béatrice, nous nous connaissions déjà. Cela ne lui faisait pas peur. Ce n'est pas son genre d'avoir peur de la réputation sulfureuse de Virginie Despentes. Quant à Emmanuelle Béart, j'ai découvert en la rencontrant qu'elle avait beaucoup "King Kong Théorie" (NDLA: essai autobiographique paru en 2006). Cela faisait donc un lien entre nous, presque de confiance. Elle avait aussi envie de tourner avec Béatrice Dalle. Elle a donc accepté facilement. Quand je l'ai rencontrée la première fois, elle m'a posé beaucoup de questions et je pense que les réponses lui ont parues correctes. Parce qu'ensuite, elle ne m'en a plus jamais posées. Emmanuelle est quelqu'un de méfiant mais une fois que l'on a gagné sa confiance, elle est totalement impliquée.

    Emmanuelle Béart a-t-elle eu des craintes à propos de l'histoire lesbienne ?

    Du tout. Emmanuelle avait déjà joué une lesbienne dans le film de Catherine Corsini "La Répétition". Donc elle avait déjà réfléchi à cela. Elle avait déjà eu l'occasion de savoir que ce n'est pas pareil. Je l'ai trouvé très respectueuse des indications que je lui donnais. Sinon pour les deux comédiennes, cela ne change pas grand-chose. Une histoire lesbienne ou une histoire hétéro, c'est égal au niveau du boulot de comédienne. De toute façon, elles savent qu'à un moment donné dans leur boulot, elles prendront dans leurs bras quelqu'un qu'elles ne connaissent pas intimement et qu'elles feront comme si elles le connaissaient intimement. C'est même plus facile parce qu'en tant que comédienne à comédienne, elles savent ce que l'autre peut craindre. Elles se sont beaucoup aidées, elles se sont vraiment bien entendues sur le tournage. Si elles ne s'étaient pas entendues, j'en aurais chié (rires).

    Il y a aussi Pascal Greggory qui joue un auteur ?

    Je l'imaginais bien comme auteur. J'ai découvert quand j'ai rencontré Pascal qu'il avait rencontré beaucoup d'auteurs. Il avait bien connu Sagan, Aragon, Duras. Il savait ce qu'est un écrivain. C'est pour ça que cela a été aussi facile de travailler avec lui. Au départ, le rôle était moins important. Le personnage s'était déployé au fur et à mesure, au départ, c'était juste un petit empâchement entre elles deux. Il est devenu le second rôle masculin du film. Parce que j'adore Pascal et que j'avais envie d'écrire pour lui. Je suis totalement séduite par Pascal Greggory, ma monteuse aussi

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