• Entretien: Olivier Laval - Les Bêtes Aveugles

    Par Michel Decoux-Derycke - Olivier Laval est un jeune cinéaste belge, d'origine liégeois. Depuis son adolescence, il fait du cinéma en autodidacte. "Les Bêtes Aveugles", son dernier court métrage, a été présenté en avant-première, en avril 2014, à Liège. C'est à cette occasion que je l'ai rencontré. Entretien réalisé avec Marie-Jeanne Cara de TV Wallonie.

    D'où vient l'idée du film ?

    Quand je commence à écrire un scénario, je ne réfléchis pas du tout. J'ai des idées qui me viennent en tête, je tisse le récit, ça marche bien. Après, j'ai une première relecture du script. A ce moment-là, je me rends compte qu'instinctivement, le fond est dedans. J'affine pour que le fond ne soit pas déformé, mal nterprété ou mal exprimé dans le film.
    Dans le cinéma belge actuel, on met beaucoup le fond avant la forme. C'est quelque chose que je ne supporte pas. Pour moi, le film doit se satisfaire en tant que divertissement, dans le sens récit avec des émotions. L'idée, c'est de s'interroger sur les émotions que me procure ce fond. Retranscrire les émotions que ce fond me procure et ne se concentrer que sur les émotions.

    Olivier Laval

    Il y a comme un goût de trop peu, on aurait aimé voir plus, pourriez-vous développer votre court pour le transformer en long métrage ?

    Je sais comment je pourrais développer cette histoire en long métrage. Maintenant, est-ce que je vais le faire ou pas ? Ce n'est pas une priorité. Je reconnais que le côté frustrant du court métrage, c'est le fait qu'on ne doive pas dépasser 30 minutes. Malgré cela, on a quand même dépassé le cadre du court, Les Bêtes Aveugles fait 34 minutes. On a tout fait pour essayer de condenser mais on ne pouvait plus rien couper sinon on détruisait le film. Oui, il y a un goût de trop peu. Je pars du principe qu'il vaut mieux être frustré au cinéma. Aujourd'hui, les films sont beaucoup trop longs. Les scénarions sont souvent émaillés de séquences inutiles qui alourdissent le récit. Finalement, je préfère rester dans quelque chose de très sec. Avec une fin ouverte qui soulève des questions.

    Comment avez-vous réussi à capter cette nature un peu sauvage qui est l'un des décors du film ?

    En fait, c'est un décor qui existe vraiment. C'est La Chartreuse, une ancienne caserne abandonnée, sur les hauteurs de Liège. Un décor fascinant pour les gens qui n'ont pas d'argent pour leur film. Nous avons débarqué dans ce décor et nous avons ajouté de la végétation à droite, à gauche. Comme du lierre sur les murs pour cacher les graffitis. Cela a donné un côté ruine romantique. Finalement, on n'a pas beaucoup joué sur le décor, on en a profité. On a juste mis en valeur les qualités de ce décor.

    Quelles sont les difficultés que rencontre un jeune réalisateur pour réaliser son film ?

    Déjà, le cinéma belge, et c'est la même chose pour la France, est sous l'influence de la Nouvelle Vague. Il n'y a rien à faire, c'est notre culture cinématographique. C'est un mouvement dont je ne sens absolument pas proche. Je me sens plus proche du style anglo-saxon. Un cinéma qui me passionné beaucoup plus parce qu'il est plus désinhibé, la mise en scène fait partie prenante du récit. On joue sur la musique, on joue sur la lumière, on joue sur les cadrages. Tout est travaillé de bout en bout. Maintenant, il y a des très mauvais films anglo-saxons, il y a de très bons films dans la Nouvelle Vague. Je ne critique pas, c'est une question de goût personnel. C'est vers le style du cinéma anglo-saxon que je tends. Le problème est qu'ici, je trouve très peu de personnes qui ont des goûts similaires dans le système cinéma. Souvent, on se heurte à l'incompréhension. Quand on dit qu'on fait un film de genre, on a un regard condescendant qui se porte sur nous. L'air de dire, c'est encore un jeune qui veut faire un film d'horreur. On est vite catalogués. C'est plus une histoire de parenté culturelle qui est vraiment un frein.


    Comment voyez-vous votre avenir ?

    Pour le moment, je ne suis pas financé mais je fais quand même mes films dans mon coin. J'aimerais faire de cette activité un boulot à temps plein et reconnu. C'est pour cela que Les Bêtes Aveugles va tourner au maximum, notamment dans les festivals. Pour avoir une reconnaissance. Aussi le travail de toute l'équipe mérite d'être vu le plus largement possible. Je continue dans mon style et je ferai toujours les films que j'ai envie de voir.

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